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La Bible et la sexualité : l'Ancien Testament


Présentation générale



Les livres les plus anciens de la Bible, pour l'essentiel communs aux traditions juives et chrétiennes, parlent de la sexualité de différentes façons : d'une part sous forme de règles de comportement, d'injonctions, de préceptes ; d'autre part, sous forme d'exemples, d'histoires de personnages.


La réglementation la plus célèbre est celle des Dix Commandements de Moïse. Elle commence par les commandements qui établissent le culte : il s'agissait, pour les fondateurs de la religion hébraïque, de couper la population des pratiques environnantes où les idoles étaient nombreuses, avec des dieux et des déesses de la fécondité dont le culte comportait des rites de prostitution sacrée. Le Dieu du peuple hébreu exige, lui, un culte exclusif. C'est un Dieu unique, sans déesse partenaire, et sans autre dieu associé. Les mythes des déesses mère, amante ou épouse disparaissent, ainsi que les rites de sacralisation de la sexualité et de la fécondité. Les autres commandements prescrivent d'honorer ses parents et de ne pas léser autrui, donc de ne pas le tuer, ni s'unir à sa femme, ni le réduire en esclavage, ni lui nuire par faux serment, ni désirer un de ses biens. Ce sont des règles de bon voisinage, qui permettent la vie sociale et la régissent. Il n'y a là rien de " sexuel ", et les dix commandements ne s'occupent pas de ce qui se passe dans l'intimité entre un homme et une femme. Dans une société patriarcale, où la polygamie est acceptée (encore à l'époque de Jésus), où la répudiation de la femme était prévue par la loi, l'injonction " tu ne commettras pas l'adultère " signifie non pas " tu ne tromperas pas ton conjoint ", mais " tu ne t'uniras pas au conjoint d'autrui ", tu ne causeras pas de tort aux autres hommes de ton clan, parce qu'en volant un bien précieux à autrui, on suscite sa rage et sa vengeance ; on en subira les conséquences néfastes, on risque sa vie, et c'est cela que le sage doit éviter (Proverbes 6, 23-24, 34-35). Au total, les dix commandements portent sur le respect dû à Dieu, à ses parents et aux autres membres de la tribu ; il est impossible de développer à partir d'eux des règles de conduite sur la sexualité intime.


Dès le premier chapitre de la Genèse, le premier récit de la création indique que Dieu créa l'Homme à son image, "mâle et femelle il les créa. Dieu les bénit et Dieu leur dit : " Soyez féconds et prolifiques, remplissez la terre." (Genèse, 1, 27-28) Les Juifs considèrent cette injonction comme le premier "et le plus fondamental  de tous les commandements " (Schalom Ben Chorin, 1982), imposant le mariage et la procréation à tous les croyants : " Celui qui se refuse au mariage manque au commandement de multiplication des hommes et doit être considéré comme un meurtrier qui diminue le nombre des êtres créés à l'image de Dieu. " (Eleasar Ben Asaj)


Le Lévitique propose un autre recueil de prescriptions, plus détaillées. Mais il concerne seulement les rites religieux, les conditions pour qu'un homme ou une femme puissent s'approcher de Dieu dans le culte et accomplir les actions sacrées. Si le croyant ne respecte pas les interdictions, il est sale, ou contagieux, donc " impur " pour le rite. Mais " il n'en est pas pour autant pécheur ", répète encore au VIIe siècle l'évêque Isidore de Séville (de même que se laver les mains avant de passer à table ne veut pas dire que notre occupation précédente était un péché). Ainsi les règles, l'accouchement, l'écoulement de sperme, le rapport sexuel rendent inaptes au culte pendant un temps déterminé, et nécessitent de se laver rituellement avant de reprendre place au milieu des fidèles. Ont d'ailleurs la même conséquence le fait de toucher le cadavre d'un animal considéré comme impur, aussi bien que plusieurs maladies de peau telles que la lèpre, les furoncles, ou la teigne (chapitres 11 à 16). D'autres chapitres insistent sur les comportements sexuels : ils interdisent sous peine de mort ou de malédiction différentes formes d'inceste (dont plusieurs ne sont plus considérées comme des incestes par nous), l'adultère, la zoophilie, l'homosexualité masculine, mais au milieu d'interdits aussi forts à propos de celui qui maudit ses parents, du couple qui a un rapport lors des règles de la femme, de ceux qui s'adressent aux devins ou pratiquent la divination (chapitres 18 à 20). Ne retenir que les interdits sexuels serait intellectuellement malhonnête, d'autant que le but de ces interdits est explicitement exprimé : il s'agit de se différencier des pratiques culturelles des peuples " païens " environnants, et non de stigmatiser des comportements anormaux, " contre-nature ", " pervers " ou je ne sais quoi.



Si les interdits rituels sont nombreux en sexualité, au contraire les histoires racontées sur les personnages de la Bible montrent que leur sexualité est très libre. La polygamie est de règle (Genèse 29, 15-30 ; 1 Samuel 25, 43 ; 2 Samuel 16, 21), avec l'existence, aux côtés des épouses légitimes, de concubines (Genèse 16, 1-3 ; 30, 3-12). Abraham laisse sa femme à Pharaon en échange de multiples cadeaux en esclaves et en bétail (Genèse 12, 15-16). D'avoir le même père n'est pas un empêchement de mariage (Genèse 20, 12). Les interdits rituels restent subordonnés à l'obéissance au premier précepte divin " croissez et multipliez-vous " : c'est pourquoi les filles de Lot, restées sans mari après le départ précipité de Sodome, enivrent leur père pour s'accoupler à lui et en avoir des enfants. Et elles sont récompensées par Dieu, qui leur donne cette progéniture désirée (Genèse 19, 31-38). L'homosexualité de David et Jonathan est présentée positivement par la qualité de l'amitié qui se développe entre les deux hommes (2 Samuel 1, 17-27). La fréquentation des prostituées est naturelle (Genèse 38, 15-19). Mais, dans d'autres récits, l'inceste d'Amnon avec sa demi-sœur est puni par sa mort (2 Samuel 13), l'adultère de David avec Bethsabée est cause de morts et de troubles (2 Samuel 11-12), même si le futur roi Salomon naît de leur union.


En conclusion, l'Ancien Testament considère comme faute fondamentale l'oubli de Dieu, et place au second rang les fautes contre la cohésion du groupe social : par exemple, les habitants de Sodome, obsédés par leurs richesses matérielles, passent tout leur temps à gagner de l'argent et à en profiter, à commercer et à bien vivre, deviennent égoïstes et ne prient jamais. Ils sont donc punis (Ézéchiel 16, 49-50). Les questions de sexualité sont très secondaires, et il n'y aura de faute que quand il y aura trouble de l'ordre social, avec les vendettas sans fin que cause notamment l'utilisation sexuelle d'un femme qui ne vous appartient pas : pour le reste, il s'agit de propreté rituelle, pas de péché.


Yves Ferroul

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