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Les lettres de 2008


                                Origine humoristique de l'expression " ante portas "



                                Une grossesse masculine racontée par Diderot

Octobre 2008


Origine humoristique de l'expression " ante portas "


            L'expression " ante portas " (qui signifie : " devant les portes ") est employée pour qualifier une éjaculation qui se produit avant la pénétration. Mais pourquoi " devant les portes " ?


On peut en effet rester perplexe devant cette expression. Car parler de " portes " au pluriel pour désigner l'entrée du vagin ne semble pas correspondre aux notions d'anatomie que l'on a habituellement : il est vrai qu'il y a pour protéger l'entrée du vagin des grandes lèvres puis des petites lèvres, et, la première fois, un hymen. Mais qui a vraiment l'impression de franchir une première porte, puis une deuxième, voire une troisième, avant de pénétrer dans un vagin ?


On pourrait alors croire que c'est une image pour expliquer l'impression que certains hommes éprouvent : après parfois de longues heures d'efforts (et pour certains on peut  parler de semaines, voire de mois de travaux d'approche) afin d'arriver là où ils sont - c'est-à-dire au face à face des sexes - la Dame peut leur sembler encore bien close. Et quand on est épuisé on surestime les difficultés. Il est naturel de croire alors devoir encore forcer plusieurs portes, et de préférer s'affaler, sans énergie, en déposant ses bagages n'importe où ! Certains, chevaleresques, diront : rendre l'âme avant de connaître le mystère du Graal !

            

            Par ailleurs, dans le latin ecclésiastique, le vagin et l'utérus sont considérés comme le réceptacle du germe humain, comme le vase dans lequel les liquides mêlés des semences féminine et masculine élaborent le fœtus. Si c'est un récipient, on s'attendrait logiquement à ce que les théologiens parlent d' " ejaculatio ante bouchonem ". Et cependant, même chez Rabelais qui aimait tant déboucher les " dives bouteilles ", cette expression n'apparaît jamais.


            En fait le poids d'une tradition beaucoup plus ancienne était déterminant pour le choix des moralistes qui ont étudié en premier les problèmes de l'éjaculation. C'est dans le Cantique des Cantiques qu'il faut en effet rechercher l'origine de l'expression qui cause notre perplexité. Dans ce recueil de chants de noces, où les mystiques chrétiens ont toujours puisé les images de leur relation à Dieu, il est un passage fort explicite à ce sujet. La jeune fiancée raconte :


            Je dors, mais mon cœur veille. J'entends mon bien-aimé qui frappe : “Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe, ma parfaite! Car ma tête est couverte de rosée, mes boucles, des gouttes de la nuit." Je me dis : "J'ai ôté ma tunique, comment la remettrais-je ? J'ai lavé mes pieds, comment les salirais-je ?" Mais mon bien-aimé a passé la main par le trou de la porte ; et du coup mes entrailles ont frémi. Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé, et de mes mains a dégoutté la myrrhe, de mes doigts la myrrhe vierge, sur la poignée du verrou J'ai ouvert à mon bien-aimé, mais tournant le dos il avait disparu ! (5/2-6).


            À trop faire attendre son bien-aimé à la porte de sa chambre, ce qui devait arriver arriva, et il y en eut plein la poignée : confus, le malheureux a préféré s'enfuir, d'autant plus qu'il risquait désormais de décevoir celle qui attendait beaucoup de lui. La jeune fille a raconté l'aventure à ses amies. Plus tard elles en ont souvent reparlé entre elles : " tu te souviens de la fois où devant les portes de l'appartement..."


Ante portas : l'expression était née.




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Novembre-décembre 2008


Une grossesse masculine, racontée par Diderot


Cet événement est arrivé au château de Nicklspurg en Moravie, et il est certifié par M. Nuch, chirurgien major des troupes de la garnison de ce château. Dans les premiers jours d’août de l’année 1773, un soldat âgé de vingt-deux ans et quelques mois fut attaqué de maux de coeur passagers, de lassitude, et de dégoût. À ces accidents succéda bientôt l’enflure du ventre ; on traita ce jeune homme comme hydropique. Les remèdes furent sans effet et le ventre grossissait de plus en plus : d’ailleurs il ressentait peu d’incommodités, et ne manquait guère à son service. Cet homme, que l’on avait abandonné depuis quelques mois à la bonté de son tempérament, et aux soins de la nature, ressentit de vives douleurs dans la région lombaire le 3 février 1774. On lui fit prendre quelques potions sédatives, mais les douleurs ne firent qu’augmenter ; on crut soulager le malade en lui faisant la ponction, et l’on fut extrêmement étonné de ne point voir d’évacuation d’eau. On eut recours à la saignée, et tous les moyens furent inutiles ; les douleurs devinrent de plus en plus aiguës, les convulsions s’en mêlèrent, et le patient mourut après quatre-vingt-dix-sept heures de souffrance. Le cas était trop extraordinaire pour qu’on ne fit point l’ouverture du cadavre : mais quelle fut la surprise des assistants, lorsque à l’ouverture de l’abdomen on aperçut un kyste, ou sac, que l’on ouvrit, et dans lequel était un foetus mâle mort, et bien conformé avec son placenta, les membranes et les eaux. Ce kyste était une matrice, à laquelle rien ne manquait, l’orifice regardait l’intestin rectum, avec lequel elle communiquait par un petit conduit en forme d’appendice ; à peine y pouvait-on introduire un tuyau d’une plume à encre ordinaire. Il n’avait que ce viscère de commun avec le sexe féminin ; d’ailleurs il était parfaitement homme intérieurement, et extérieurement. La position des ligaments de cette matrice était dans l’ordre naturel. Les vaisseaux spermatiques aboutissaient en partie aux ovaires, et une autre partie continuait son chemin jusqu’aux testicules. Ce lacet était double. On examina la forme des os du bassin, elle était telle qu’elle doit être dans l’homme. Les mamelles n’étaient pas grosses, mais elles contenaient du lait, et leur aréole était large et noire. On se rappela alors que ce soldat s’était plaint plusieurs fois de sentir remuer quelque chose dans son ventre, et particulièrement 30 heures avant sa mort ; mais on avait attribué ce symptôme aux eaux, que l’on supposait. Il ne restait aucun doute sur la manière dont cet homme pouvait avoir engendré, mais pour s’en rendre encore plus certain, on s’empara de son compagnon de lit, on le mit aux fers, et par des menaces réitérées on lui fit avouer ce que l’on soupçonnait violemment (Gazette des Deux-Ponts, année 1775, numéro 22). (in Diderot, Éléments de physiologie, chapitre 24, Génération)

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Les lettres de 2009


                                1956 : Et Dieu créa la femme, avec Brigitte Bardot



                                1910 : Moyens d'éviter la grossesse...



                                La destination finale des spermatozoïdes



                                1847 : Lire des romans est un péché


                                

                                La masturbation, ce vice terrible...  



                                La syphilis, entre rire et accablement

Nov-décembre :

Janvier-février :

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Octobre :

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Janvier-février 2009


Brigitte Bardot :

       « Le 28 novembre 1956 sortait dans les salles parisiennes… »


Le théologien allemand Eugen Drewermann fait du jeu de Brigitte Bardot un moment important de l’évolution des idées contemporaines sur la sexualité. Malgré les tentatives de démonisation, dirigées par le Vatican, dont elle est l’objet, l’actrice diffuse dans le monde entier une image séduisante de la sexualité, rieuse, légère, naturelle, spontanée, aux antipodes du discours dominant. Plus rien ne sera comme avant…


« Tout cela fondit comme neige au soleil avec l’irruption de la libération sexuelle dans notre société : une évolution qu’illustre peut-être le mythe déjà bien passé de Brigitte Bardot à la fin des années 50 et au début des années 60. Un ouvrage sur l’esthétique du cinéma érotique portait ce jugement sur celle-ci : « Avec son jeu d’actrice, la sexualité féminine atteint un degré de franchise et de naturel qui corrige véritablement, peut-être pour la première fois dans le cinéma érotique, l’image de la femme forgée dans l’« Occident chrétien ». Déjà la manifestation de son être corporel révèle une totalité, une unité du corps et de l’esprit, de la sexualité et du caractère qu’aucun sex-symbol n’a atteint avant elle est bien peu après elle. On ne peut rien soustraire son érotisme, et c’est pour cela qu’elle reste sujet. Il est sans doute exagéré de la considérer comme une figure symbolique de l’émancipation féminine. Mais cette féminité indivisible, qu’on ne peut arbitrairement ni simplifier, ni non plus aisément démoniser ou caricaturer, était certainement un message. »

« Le message de Brigitte Bardot s’est élaboré à travers des petites séquences où l’actrice, oublieuse d’elle-même, était entièrement elle-même et où l’équivalence de l’érotisme et de la joie de vivre se manifestait dans les images les plus simples : un baiser, un pas de danse, sans rien de la dramatisation des stars d’Hollywood, des moments de bonheur, pas seulement de celui d’un amour sûr de lui-même, mais aussi celui des « cajoleries » du soleil et de la mer, donnaient le plus souvent un démenti mérité aux réserves « morales » que pouvaient inspirer les scénarios. La nouveauté de cet événement cinématographique consistait déjà dans cette possibilité, jusqu’alors réservée au sexe masculin, de séparer sur le plan émotionnel l’objet du désir de la jouissance sexuelle elle-même, sans lien donc à l’amour « éternel » et sacré (« chaque amour à la durée qu’il mérite », dit-on fréquemment à cet égard dans certains milieux). Mais cette nouveauté résidait aussi dans une juvénile revendication de l’expérience érotique. »


Eugen DREWERMANN, Fonctionnaires de Dieu, Albin Michel, 1993 (1989), p.446.


Et Dieu créa la femme sort à Paris le 28 novembre 1956, il y a 52 ans.

Le film est lancé dans de mauvaises conditions et ne sera apprécié que petit à petit, le temps pour les spectateurs de s’identifier à l’actrice et d’être fascinés par la nouvelle féminité qu’elle propose : orpheline, l'héroïnee n’a pas d’autre bien que son corps et sa beauté, et elle veut se servir d’eux pour conquérir sa liberté dans une société d’hommes. Or cette société voulait ne lui offrir comme choix que l’alternative entre se retrouver enfermée au pensionnat ou se marier, les deux seuls cadres de vie concevables pour une jeune fille, afin qu’elle soit « protégée ».

Mais les Françaises venaient d’obtenir le droit de vote en 1945, et cette égalité de citoyennes avec les hommes servait de base à un rêve d’égalité dans le désir et le plaisir : le film montre bien que les hommes font ce qu’ils veulent, ne sont pas jugés, et que seul le personnage féminin se voit reprocher sa conduite, pas son amant. Or l’héroïne exprime son désir et vit sa sexualité en agissant comme un garçon, sans tenir compte du rôle que la société veut imposer à son sexe. Elle ne s’occupe pas des convenances, ni des travaux ménagers (pourtant dévolus aux femmes), mais pense seulement à jouir sans entraves.

Le choc est grand.

Massivement les Françaises vont adopter le personnage joué par Brigitte Bardot, se coiffer comme l’actrice, s’habiller comme elle. Et vont vouloir vivre comme l’héroïne une sexualité légère, de plaisir, sensuelle, naturelle, spontanée, exempte du caractère sulfureux qu’elle avait, incarnée par les grandes stars en vogue alors.

Mais les défenseurs des « bonnes mœurs » veillent. En France, ils imposent la coupure de certaines scènes, en Grande-Bretagne aussi. Aux USA, ils tentent de faire interdire le film dans certains États, et dans d’autres tentent d’acheter à l’avance tous les billets pour empêcher les fidèles de voir ce film maudit. L’archevêque de Lake Placid va même jusqu’à promettre l’excommunication à ceux qui braveraient l’interdit jeté sur lui. Le chef de la police de Dallas en défend la représentation dans les salles réservées aux Noirs, car cela risquerait de les exciter et de provoquer des désordres…

Bien sûr, tout ce remue-ménage ne fait qu’attiser la curiosité et contribue au succès phénoménal du film, ainsi qu’à la notoriété de Brigitte Bardot. Le général De Gaulle reconnaîtra l’actrice comme concurrente en popularité (avec Tintin), prenant acte qu’elle rapporte cette année-là à la France plus de devises que la Régie Renault, avant d’être le symbole de la République en servant de modèle à Marianne.

Les adversaires n’abandonnent pourtant pas. En 1958, à l’Exposition Universelle de Bruxelles, « le pavillon du Vatican avait réservé une salle aux saints, au Bien, aux miracles, alors qu’une autre était dédiée aux méfaits du Mal, du démon, de la luxure et de l’enfer. Dans cette dernière, une photo de Brigitte Bardot dansant le mambo endiablé de Et Dieu créa la femme représentait le vice sous toutes ses formes. L’image et la vie de l’actrice étaient associés au scandale, à l’immoralité, au péché de chair, au symbole de la dépravation. » (www.lamediatheque.beJ)

Mais il était trop tard. L’élan était donné, et il était devenu très difficile de faire peur de la sexualité en continuant à en présenter des caricatures négatives. Brigitte Bardot était passée par là : désormais, quand on parlait de sexualité, c’est elle que tout le monde voyait. Et, franchement, cette image n’avait rien de repoussant…


  

  

Mars-avril 2009


L'usage fréquent du préservatif ne débute pas à la fin du XXè s., mais bien auparavant. Cependant, dans ces années 1910, l'industrie du caoutchouc a encore quelques progrès à faire pour pouvoir proposer des produits de qualité. Alors, pourquoi ne pas s'y mettre personnellement ?


Moyens d'éviter la grossesse, par G. Hardy, 1910, p.44-45.


            Le condom est généralement considéré comme le préservatif le plus efficace. Les professeurs Krafft-Ebing et Sarwey recommandent son emploi de préférence à tout autre procédé anticonceptionnel. En 1905, au congrès de Zurich, organisée par la Société pour combattre les maladies vénériennes, l’unanimité des médecins s’est prononcée en faveur du condom, l’indiquant comme le seul moyen méritant d’être recommandé et contre les maladies vénériennes et comme moyen anticonceptionnel. Le professeur Forel, Hans Ferdy, Rutgers, Lutaud, etc., partagent cette opinion.

L’emploi du condom n’est nuisible ni à la santé de l’homme ni à celle de la femme. Les mêmes autorités s’appuient sur leur expérience pour l’affirmer hautement.

Nous allons examiner l’emploi des divers condoms en baudruche et en caoutchouc.


Condoms en baudruche.


I. –  Les condoms en baudruche sont fabriqués avec la partie de l’intestin du mouton appelé caecum.

Le professeur Forel a indiqué l’usage du caecum de mouton, utilisé directement, sans préparation industrielle, comme moyen très simple et à très bon marché (La Question sexuelle). D’après lui, la préparation industrielle est superflue. On fait usage du caecum (de mouton, de chèvre ou de jeune veau) telle qu’on peut l’avoir chez le boucher, au prix approximatif de cinq centimes pièce.

On achète, par exemple, une demi-douzaine de caecums ; on les nettoie minutieusement dans l’eau tiède, et, par surcroît de précaution, on les désinfecte durant 24 heures dans une solution de sublimé corrosif et d’eau bouillie et filtrée (1 g de sublimé pour 1000 g d’eau bouillie).

Pour usage, après avoir vérifié si la membrane n’est pas percée, on en garnit le membre viril, en ménageant, comme nous l’avons dit, un espace libre au bout de la verge. Mouiller ensuite à l’eau savonneuse.

Après usage, nettoyer dans l’eau antiseptisée : sublimé (25 cg par litre d’eau bouillie). Le même appareil peut servir trois ou quatre fois

Ce procédé est à recommander à tous ceux qui peuvent se procurer des caecums chez les bouchers. En maints endroits, ce sera difficile.


II. – Les condoms en baudruche préparés industriellement sont d’un emploi fréquent. Ils ont été utilisés antérieurement aux condoms en caoutchouc.

Ils sont résistants, mais manquent d’élasticité. Leur inconvénients est qu’à l’usage répété ils se durcissent, au point de devenir cassants, et se rétrécissent. On les vend, non enroulés, en long. Les prendre de préférence de grande taille.

Ces appareils se fabriquent en qualités diverses et il est bien difficile de se reconnaître dans la profusion des qualités et des prix offerts aux profanes par les commerçants. Les moins chers ont généralement quelques défauts, le plus souvent des trous, masqués par des lambeaux de baudruche collés, trucs employés par les fabricants pour faire passer les condoms défectueux. Avant l’achat, si c’est possible, et toujours avant l’emploi, regarder le préservatif par transparence pour s’assurer qu’il n’y a point de pièces masquant des ouvertures. Ces morceaux collés se détachent en effet à l’humidité et laissent des trous par lesquels des parcelles de sperme peuvent s’échapper dans le vagin.

Pour introduire la verge, souffler dans le préservatif de façon à séparer les parois qui ont tendance à s’accoler. Quand elle est introduite, en ménageant toujours un espace libre à l’extrémité, on peut, pour faciliter l’adhérence de l’appareil à la peau et le glissement dans le vagin, le mouiller extérieurement.

Après usage, laver à grande eau d’abord, puis dans de l’eau savonneuse ou antiseptisée (au sublimé, par exemple : 25 cg pour 1 l d’eau bouillie). Gonfler en soufflant dedans ; vérifier qu’il n’y a ni trou, ni déchirure ; séchez en tamponnant avec un linge bien propre.

Il est évident que si une déchirure se produisait durant le coït, la femme devrait prendre immédiatement une injection (voir page 60).

On peut avoir des condoms en baudruche à des prix très variables, suivant que les qualités sont fines, surfines, extrafines, supérieures, blanches, extra blanches, etc., et il y a toute une gamme de divisions dans chaque qualité.

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Mars-avril :

Mai-juin 2009

                  La destination finale des spermatozoïdes...


D'après Brantôme, et les dames du XVIè s., le sort de la quasi totalité des spermatozoïdes est de finir dans les égouts, ou les fosses d'aisance : on peut se demander alors si le passage par le vagin est vraiment une nécessité !


Les moralistes religieux affirment que le seul acte sexuel valide moralement est la pénétration vaginale, car elle aboutit à l'émission du sperme dans le vagin, conformément à la nature du vagin qui est d'être son unique réceptacle naturel. Répandre le sperme ailleurs serait donc une faute contre-nature.

De même, beaucoup de ceux qui se mêlent de psychologie ou de sexualité considèrent comme "pervers" les actes sexuels autres que cette pénétration vaginale.

Le Catéchisme de l'Eglise catholique, de son côté, enjoint à chaque personne de maintenir "l'intégralité des forces de vie ... déposées en elle" (§2338), ce qui doit vouloir dire de ne pas gaspiller ses spermatozoïdes en les répandant n'importe où. Quand le plaisir sexuel est recherché pour lui-même, "isolé des finalités de procréation et d'union", c'est-à-dire, pour parler clairement, hors d'un coït vaginal sans contraception, le Catéchisme le déclare "moralement désordonné" (§2351), consistant en luxure, en masturbation (§2352), en fornication (§2353), fautes gravement répréhensibles. Si donc pour le Catéchisme "tout acte matrimonial doit rester ouvert à la transmission de la vie" (§2366), c'est aussi que pour lui la seule destination du sperme marital est le vagin de l'épouse.

Or, que devient le sperme, tout sperme, une fois éjaculé ? Plus ou moins vite la femme ira faire sa toilette, et le sperme se retrouvera dans les égouts.

On peut donc se poser la question du caractère dérisoire de l'acharnement mis par certains à réclamer une étape vaginale obligatoire avant d'aboutir aux égouts. Si telle est la destination finale, les étapes intermédiaires, la main, les draps, les seins, le ventre, la bouche, le rectum... ou le vagin, perdent la possibilité d'un caractère sacré ou magique, et n'ont plus qu'une signification banale, futile, n'ayant pour prix que le plaisir des personnes concernées.

C'est ce que, d'après Brantôme, les femmes du XVIè siècle avaient déjà constaté : le grand cas que les hommes font de leur liqueur magique, de cette semence de vie, n'est-il pas en complet décalage avec la réalité des faits, particulièrement triviale ici ?

" Oui, dit la dame ; mais aussitôt ce beau sperme, que vous autres dites être le sang le plus pur et net que vous avez, je le fais pisser incontinent et jeter ou dans un pot ou un bassin, ou aux toilettes, et le mêler avec une autre ordure très puante, et sale et vile. Car, de cinq cents coups que l'on nous touchera, de mille, deux mille, trois mille, voire d'une infinité, nous n'engrossons que d'un coup, et la matrice ne retient qu'une fois... Si le sperme qui est retenu, lui, est bien logé, le reste nous le logeons comme je viens de le dire, fort salement. Voilà pourquoi il ne faut pas vous vanter de ce que vous nous faites avec votre sperme : car, sauf celui que nous gardons pour concevoir, nous le rejetons et rendons pour n'en faire plus de cas aussitôt que nous l'avons reçu et qu'il ne nous donne plus de plaisir... Et notez que la moindre bagasse peut en dire autant à un grand roi ou prince, s'il lui a fait l'amour ! Ce qui est un grand mépris, quand on sait que l'on tient le sang royal pour le plus précieux qui soit ! Et vraiment il n'est pas mieux gardé ni logé plus précieusement que celui d'un autre ! " (Les Dames galantes, Ier discours)

Somme toute, le rire aussi peut rappeler au bon sens.

  

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Mai-juin :

Comment

se procurer cet ouvrage ?

  

Juillet-août 2009

                  La lecture des romans est un péché

 

Dictionnaire des cas de conscience, par PONTAS, 1847.


Les romans et les films font tellement partie de nos vies que nous avons oublié que les récits d’histoires imaginaires ont été longtemps combattus dans notre société, et longtemps objets de condamnations morales intransigeantes, et ce jusqu’à une date récente.

Quand Pontas écrit son Dictionnaire, en 1847, l’immense vague romanesque du xixè siècle a déjà bien submergé la vie culturelle, et est devenue une composante essentielle de la société. Stendhal a écrit Le Rouge et le Noir en 1830, La Chartreuse de Parme en 1839 ; Balzac, Eugénie Grandet en 1833, Le Père Goriot en 1835, Le Lys dans la vallée en 1836, etc. George Sand, La Mare au diable en 1846, François le Champi en 1847…

Et pourtant les moralistes restent suspicieux devant les textes de fiction : la comédie et les comédiens sont toujours mis au ban de la société, les romans sont toujours vus comme sources de perte de temps, détournant de la prière et d’occupations plus utiles au salut de l’âme. Et toujours aussi le même reproche de dévoyer l’imagination et d’entraîner à la luxure.

La condamnation est sans appel, comme le montrent ces extraits.

Dans l’article « Livres défendus » de son dictionnaire, l’auteur indique qu’il veut parler des livres « qui tendent à corrompre le cœur et la pureté des mœurs, tels que sont les livres de contes obscènes, les romans et les intrigues d’amour, les comédies, et autres de ce genre ».

Selon le principe de l’ouvrage, l’auteur présente un cas avant de le discuter.

Ici, il présente le cas d’une jeune fille qui « se récrée souvent à lire des romans, où sont décrites des intrigues d’amour ingénieuses et plaisantes, mais où il y a aussi des expressions qui choquent la pudeur. Cependant, comme elle est chaste, ces lectures ne font pas d’impression sur son cœur, et satisfont seulement son esprit. Son confesseur veut qu’elle brûle ces livres, quoiqu’elle en ait pour vingt écus. Elle s’en défend sur ce que ces lectures ne l’ont portée jusqu’à présent à aucun dérèglement contre la pureté. Est-elle obligée d’obéir à son confesseur ? »

La réponse est sans ambiguïté :

« Oui, et très obligée ; car sans parler de la perte du temps qu’elle emploie à ces mauvaises lectures, et de l’impuissance où elle est de prier, pendant qu’elle a l’imagination remplie d’idées malhonnêtes, il est sûr :

1° que, quoi qu’elle en pense, elle ne peut avoir le cœur bien pur pendant que son esprit se repaît du malheureux plaisir qu’elle trouve dans ce tissu d’intrigues et d’amourettes ;

2° parce qu’en aimant le danger, elle s’expose à périr. Il en a fallu moins pour en perdre bien d’autres. C’est pourquoi le célèbre Gerson dit : Il est difficile de lire des livres poussant à la luxure sans commettre un péché mortel. Et ceux qui détiennent de ces ouvrages doivent être poussés par leurs confesseurs à les brûler ou à les détruire afin que ni eux-mêmes ni d’autres ne pèchent davantage. Lire ces sortes de livres avec une délectation charnelle serait un péché mortel ; mais ceux qui ne les lisent que par curiosité, ou par manière de récréation, ne pèchent que véniellement, à moins qu’il n’y ait danger prochain d’une délectation criminelle.

Quant à certaines tragédies, certains romans qui ne sont pas très immoraux, quoiqu’on puisse les lire sans péché mortel, quand il n’y a ni grand scandale, ni danger de consentement honteux, ils ne laissent pas que d’être fort nuisibles. L’expérience apprend, dit Vernier, que de la lecture de ces ouvrages, naît une incapacité de s’appliquer à un travail soutenu, et l’extinction de l’esprit de ferveur et de piété. »


L’auteur propose ensuite le cas d’un libraire qui « débite plusieurs sortes de contes, romans, comédies et autres livres remplis d’histoires amoureuses, d’expressions équivoques, capables de porter à l’impureté les jeunes gens, et ceux qui n’ont qu’une vertu médiocre. Son confesseur veut qu’il les brûle ou qu’il les mette au pilon. » Le libraire se défend en arguant que la censure royale autorise ces ouvrages, qu’il perdrait en les détruisant beaucoup d’argent, que ses clients iraient chez les concurrents sans problèmes.

La discussion du cas est claire : il n’y a qu’une chose à répondre à ce libraire, « c’est qu’il est en état de damnation, s’il ne détruit tous ces livres, parce qu’il est la cause de tous les péchés que commettent eux qui les lisent ». Le privilège royal ne peut pas faire qu’un livre propre à nourrir et à exciter l’impureté ne soit pas mauvais, et « ne justifie pas plus la comédie que les comédiens ». Les autres arguments sont dits frivoles par rapport à la perte de son âme.


On est bien loin de Nancy Huston expliquant que le roman joue un rôle éthique, nous permettant de devenir meilleurs. Avec sa « manière d’encourager l’identification à des êtres qui ne nous ressemblent pas », il nous entraîne à comprendre l’autre, à agrandir notre univers. Finalement ce sont « les non-lecteurs (qui) sont potentiellement dangereux, car faciles à manipuler ». (L’espèce fabulatrice, Actes Sud, 2008)

  

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Juillet-août :

Septembre-oct :

Septembre-octobre 2009

      

      La masturbation, ce vice terrible, qui mine la santé...

 

La Médication naturelle, par F. E. Bilz, 1900.
















La masturbation a été l'objet d'attaques très virulentes du XVIIIè siècle jusqu'au XXè, sous le prétexte qu'elle causait des maladies graves, aboutissant à l'impuissance, à la dépression sévère, et précipitant la mort. Comment prévenir cet engrenage catastrophique ? Car la peur de la décrépitude et de la mort ne peut avoir qu’un effet préventif, et elle reste inefficace quand l’habitude est prise. Aussi, pour interdire que le comportement vicieux ne s'installe, les parents doivent-ils se mobiliser très tôt et se montrer particulièrement vigilants dès la petite enfance : Avant tout, les parents auront un œil très attentif sur l’enfant. On ne le laissera jamais dormir seul dans une chambre. On n’aura pas peur non plus d’aller le trouver plusieurs fois, la nuit, et de lever la couverture, qu’il dorme ou non. Menacé par ces visites, l’enfant n’osera plus continuer son vice. (Bilz, p.1314)


Des éducateurs vont ainsi violer l’intimité des enfants, les faire vivre dans des conditions semblables à celles des quartiers d’exception dans les prisons (cellules sous surveillance constante), sous prétexte de moralité !

Mais les adultes, même parents, doivent dormir de temps en temps. Pour compléter leur surveillance, ils inventeront des vêtements adéquats : On mettra à l’enfant des gants grossiers, sans doigts, fortement liés au poignet.

On peut aussi lui mettre, pour la nuit, un habit entièrement fermé, qui enveloppe à la fois le tronc et les membres, et qui corrige même les petits pécheurs les plus endurcis. On menacera encore du médecin…

Ce vice… se combattra au moyen d’un vêtement d’une pièce, complètement fermé pour le tronc et pour les membres, et doublé de cuir ou d’étoffes semblables dans la région des parties sexuelles, de façon à le rendre inflexible. Les enfants devront porter ces vêtements non seulement la nuit, mais le jour aussi, et il faudra qu’en cas de besoin ils ne puissent être ouverts que par les parents. (Bilz, p.1314)


Ces gants et ces vêtements seront vendus et auront leur publicité (notamment dans le Larousse Médical) encore après 1920…

Une version plus légère est le " bandage contre l'onanisme ", pour " empêcher les pratiques solitaires des enfants et des adultes " : " ce bandage se construit sur mesure pour tous les cas ". (cf. fig.)

Plus radicalement, d’autres médecins préconisent l’infibulation : un anneau dans le prépuce des garçons ou dans les lèvres des fillettes. En 1707, le chirurgien Pierre Donis dénonce : Je ne sais pas qui est l’inventeur du bouclement des garçons ; mais cette opération choque le bon sens. On tirait le prépuce en dehors, et le traversant d’une aiguille enfilée, on y laissait un gros fil jusqu’à ce que les cicatrices des trous fussent faites ; puis retirant le fil, on passait à la place une grosse boucle de fer, qu’on y laissait tout le temps que le sujet était dans un âge incapable de travailler à la génération. Ils prétendaient que cette boucle l’empêchant d’avoir commerce avec des femmes jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, qui est le temps qu’on l’ôtait, les forces ne se dissipaient point, et qu’elles se conservaient pour engendrer les enfants forts et en état de servir (la société).


En 1900, Bilz propose un anneau pour empêcher les pollutions nocturnes chez le garçon (cf. fig.)

Il en vante ainsi les mérites : " C'est le remède le plus simple et le plus sûr contre les pollutions nocturnes chez les hommes. Il se compose d'un anneau métallique nickelé, que l'on peut rétécir ou élargir à volonté, pourvu de dents, et que l'on pose sur la verge. Les dents de l'anneau empêchent le gonflement de la verge ou réveillent le dormeur. S'adresser à Quillet et Cie, 17, rue d'Hauteville, Paris. "


Aujourd'hui, le bandage est remplacé par une sorte de ceinture de chasteté pour homme, dont la publicité dit encore, au XXIè siècle, qu'elle est très efficace contre la masturbation des jeunes gens...

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La lettre du mois

Novembre-Décembre 2009

La syphilis, entre rire et accablement.


Nous n’avons plus idée, aujourd’hui, de l’horreur que représentaient certaines maladies pour nos ancêtres. La découverte, et l’utilisation massive, des antibiotiques a fait disparaître de nos sociétés des maux qui étaient des cauchemars pour eux. En particulier, la syphilis.

Stefan Zweig, par exemple, rappelant sa jeunesse, pense avant tout à ses camarades qui se sont suicidés en se découvrant atteints par la syphilis : ils ne pouvaient s’imaginer vivant avec une telle maladie ! (Le Monde d’hier, Poche)

Alphonse Daudet tiendra un carnet où il notera sa dégradation inexorable, sa lutte contre la douleur et ses tentations de suicide : « Songes de suicide. – Rencontre de N*** et ce qu’il me dit, continuant ma pensée : « …entre la première et la seconde côte ». (Strychnine.) – On n’a pas le droit. » (La Doulou)

Mais devant l’extrême gravité des atteintes physiques, devant les souffrances parfois atroces, d’autres, tout au long des xviiiè et xixè siècles, vont recourir au rire pour garder un tant soit peu de dignité.

Ainsi Casanova, victime à plusieurs reprises de la maladie, parvient-il à plaisanter : « Ce mal laisse des cicatrices, mais on s’en console facilement quand on pense qu’on les a gagnées avec plaisir, comme les militaires qui se plaisent à voir les marques de leurs blessures, sources de leur gloire ».

Flaubert, dans une lettre à un de ses amis, fanfaronne : « À propos de mon infortuné sexe, il est guéri pour le moment. À peine une induration, mais c’est la cicatrice du brave. Ça le rehausse de poésie. On voit qu’il a vécu, qu’il a passé par des malheurs. Ça lui donne un air fatal et maudit… »

Maupassant n’est pas en reste : « J’ai la vérole ! Enfin ! La vraie ! Pas la méprisable chaude-pisse, pas l’ecclésiastique christalline, pas les bourgeoises crêtes-de-coq. NON-NON, la grande vérole, celle dont est mort François Ier. La vérole majestueuse et simple, La syphilis. Et j’en suis fier, morbleu ! »

Que le partage amoureux ou érotique aboutisse à se communiquer une maladie aussi grave et pénible amène à se moquer de l’échange, à le tourner en dérision.

Ainsi Voltaire fait expliquer par un des personnages de Candide (fin du ch. IV) les raisons de sa contamination en l’attribuant à l’efficacité de l’échange  : « Panglos prend la vérole de Paquette qui tenait ce présent d’un cordelier qui, lui, avait fait des recherches pour retrouver la source de la contamination : il l’avait eu d’une vieille comtesse qui l’avait reçu d’un capitaine de cavalerie qui le devait à une marquise qui le tenait d’un page qui l’avait reçu d’un jésuite, qui, quand il était novice, l’avait eu d’un compagnon de Christophe Colomb… » Furet que l’on se repasse furtivement ; chaîne d’amour que l’on ne peut interrompre, et qui unit des personnes de toutes conditions sociales dans un même destin …

Jean-Didier Vincent rappelle, dans Casanova, la contagion du plaisir, le mécanisme de la diffusion de la maladie, à propos d’un épisode de la vie de Casanova. Celui-ci, contaminé, ne peut résister aux avances de la gouvernante d’un prêtre qui le loge dans le petit port d’Orsara, et rembarque au matin. Neuf mois plus tard, le héros se retrouve faire escale dans ce port. Pendant qu’il arpente le quai, un homme le regarde avec attention, puis l’aborde et l’interroge : « Serait-il le même jeune homme qui fut l’an passé dans la ville ? Indiscrétion ? Non, reconnaissance. Il lui doit son bonheur. Casanova apprend toute l’histoire. L’inconnu est chirurgien. Il y a vingt ans qu’il opère dans cette ville où il vivait dans la misère à saigner quelques bras, à poser des ventouses ou à réparer une entorse. Depuis l’année passée, il a changé d’état ; il est riche et c’est Casanova, Dieu le bénisse, qui a fait sa fortune. Cet envoyé du ciel a communiqué une « galanterie » à la gouvernante d’un curé qui l’a donnée à un ami qui de bonne foi la partagea avec sa femme. Celle-ci à son tour l’a donnée à un libertin qui en fit un si grand débit qu’en moins d’un mois le chirurgien vit sous son magistère une cinquantaine de clients et plus encore les mois suivants.

Mais le courant s’est tari et le chirurgien se réjouit de voir le retour de la source de ses revenus.

Il lui fallut déchanter, Casanova est sain comme un matin de printemps… » (p.33)

Rire ou se suicider, voilà le choix qui s’offrait à nos ancêtres avant que la science vienne éliminer la source du dilemme.

Mais un virus nouveau…

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